Fayard: Craintes valeurs éditoriales effacées avec nomination Lise Boëll par Vincent Bolloré

Des sources internes chez l'éditeur Fayard dénoncent le projet "idéologique" de Vincent Bolloré avec la nomination de Lise Boëll à la tête de la maison
          Chez Fayard, l'un des plus anciens éditeurs français, l'on craint que les valeurs de la maison d'édition soient "effacées" afin de servir le projet politique de l'homme d'affaires Vincent Bolloré.

Au sein de la maison d’édition Fayard, qui compte parmi les plus anciennes en France, il y a une inquiétude quant à la possible altération des valeurs de l’entreprise pour servir les intérêts politiques de Vincent Bolloré, un homme d’affaires.

Des informations en provenance de sources internes à la maison d’édition Fayard ont dévoilé le projet « idéologique » de Vincent Bolloré, critiquant le milliardaire conservateur pour sa volonté de récupérer cette marque au profit d’une éditrice connue pour ses convictions de droite. Lise Boëll, âgée de 57 ans, est réputée pour avoir contribué à la transformation d’Éric Zemmour, journaliste au Figaro, en un essayiste d’extrême droite à succès chez Albin Michel dans les années 2010.

Hachette Livre, une filiale de Lagardère appartenant à Vivendi, le groupe de Vincent Bolloré, a annoncé le 22 février la nomination de Lise Boëll en tant que directrice générale des éditions Mazarine. Le groupe a précisé que Mazarine et Fayard, une autre maison d’édition de Hachette Livre, seraient désormais indépendantes après avoir été liées pendant 45 ans.

### Opposition à l’association avec Mazarine et à la disparition de Fayard

Selon des sources internes à Fayard interrogées par l’AFP, Vincent Bolloré avait initialement envisagé d’embaucher Lise Boëll chez Fayard. Cependant, ce projet a suscité une forte désapprobation au sein de la maison, de la part de la PDG Isabelle Saporta jusqu’aux employés, syndicats et auteurs. Le milliardaire a donc changé de stratégie.

Ces sources chez Fayard ont révélé dans La Lettre et Le Monde que la marque Fayard serait apposée sur les livres de Mazarine. L’une de ces sources a confirmé à l’AFP, sous couvert d’anonymat, que « l’utilisation de la marque échappera aux éditions Fayard, puisque le projet est de la céder sous forme de licence, sans aucun contrôle éditorial ». Elle a ajouté : « Fayard et Mazarine sont deux projets idéologiques totalement différents. Les faire coexister sous le même nom n’aurait aucun sens ». Interrogée par l’AFP, une source proche de Vivendi s’est refusée à tout commentaire sur ce projet. La direction de Hachette Livre et Lise Boëll n’étaient pas disponibles pour répondre aux sollicitations.

### Au service d’un projet politique réactionnaire

Vincent Bolloré répète ce qu’il avait déjà mis en place dans un autre groupe d’édition qu’il possédait jusqu’à fin 2023, Editis, le deuxième plus grand groupe éditorial français. Lorsque Lise Boëll a quitté Albin Michel fin 2021 après 24 ans de carrière, il l’a recrutée pour diriger Plon, l’une des plus anciennes maisons d’édition françaises encore en activité, tout comme Fayard.

Selon des sources internes à l’AFP, Hachette Livre prévoit de transférer les locaux de Mazarine rue d’Assas à Paris, comme ce fut le cas pour Plon à l’époque. Lise Boëll envisage de s’entourer de collaborateurs ayant travaillé chez Plon pour attirer les mêmes auteurs, dont Philippe de Villiers ou Stéphane Bern. L’Obs a rapporté en février que Lise Boëll avait convaincu Jordan Bardella, président du Rassemblement national, d’être l’éditeur de son premier livre en vue des élections européennes de juin, où il sera tête de liste. Cet ouvrage est l’une des raisons principales pour lesquelles la direction, les employés et les auteurs de Fayard ne veulent aucun lien avec Mazarine.

Une source a regretté : « Une licence signifie : je veux ton nom, ta marque, ton prestige, et tu n’as pas ton mot à dire ». Vincent Bolloré ne cache pas son attachement à un catholicisme traditionaliste et est critiqué par de nombreux détracteurs pour utiliser les médias et maisons d’édition qu’il contrôle au profit d’un projet politique réactionnaire.

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